Départ à 10h de la “Gare routière” de Irkutsk dans un mini van. 6h de route dont la première partie, bien que goudronnée et trempée par la pluie du matin n’ont pas empêché le conducteur de faire des dépassement sans visibilité sur une route à une voie, et de ne pas se ranger si un véhicule arrive en face. Après tout, il n’a qu’à se pousser dans le bas côté !
Malgré les secousses de la piste en terre de la deuxième partie, certains arrivent à dormir et d’autres même à s’enfiler une bouteille de Gin ! Si bien que quand on descend du ferry pour arriver sur l’île on aurait pu croire que c’était le mal de mer qui le faisait tituber !
Arrivé dans la plus grande “ville” de l’île qui est en fait plus un “regroupement de maison”, c’est un voyage dans le temps. Cela ressemble à ce que l’on peut imaginer du Far West américain, ce que l’on voit dans Lucky Luke… Mais sur une île ! Et avec une fôret toute proche.
Maison en bois, larges rues en terre, pas un chat en ville, quelques 4x4 ou mini van qui slaloment, en trombe, entre les troues dans la route, et en haut de la coline, l’église orthodoxe, blanche et bleue, avec ses cloches.
Un échange de SMS plus tard je me rapproche de ladite église, mon hôte habite à côté. Et pour cause, il en est le gardien ! Il me reconnait dans la rue et m’interpelle.
L’idée est simple, cet homme a construit une maison dédiée à l’accueil des CouchSurfers et autres voyageurs de passage sur l’ile, et en contrepartie de son accueil aussi chaleureux que spirituel sur cette île magique, il s’attend à ce que l’on donne un coup de main pour continuer à bâtir ou améliorer cette maison. Quand je suis arrivé, le plus important était fait, murs, toit, lits, matelas, coin cuisine, table, bancs, évier, étagères… Sergueï et deux amis (Igor et Tixon) étaient en train de consolider le plafond qui supporte aussi le deuxième étage. Je pose mon sac et donne un petit coup de main, en essayant de parler russe. Heureusement Sergueï parle un francais parfait et m’aide à comprendre et me faire comprendre de ses deux amis. Ca ne fait que quelques minutes que je suis là et je me sens déjà à l’aise, aidant ça et là, de ce que je peux et de ce que je comprend. La discussion s’engage :
- Tu es peintre, artiste ?
- Non
- Tu sais dessiner ?
- Non
- Tu joues un instrument alors ?
- Ah non… Tu sais, pour ce qui est disciplines artistiques…
- Tu es un sportif alors ?!
- Heu, non pas vraiment
- Tu joues aux échecs !
- Mouais, je ne suis pas très bon…
Et puis il a arrêté ses questions, comme si il avait fait le tour de tout ce qui était réellement important. Et là je me suis senti bien stupide. En fait je sais rien faire alors ? Moi qui m’apprêtait à sortir fièrement mon “Je suis ingénieur !” et je me suis rendu compte qu’en fait, aucune de mes compétences n’était utile ici. En pratique, pour consolider un plafond, peindre une table ou réparer un luminaire, un ingénieur en informatique, ca ne sert à rien !
Il est rapidement 6h, le soleil se couche, Sergueï m’apporte gentillement un bol de borsch et son disque dur externe, que des francais de passage quelque jours avant ont rempli de films en francais. C’est comme ca que je passerai ma première soirée, dans le calme de khuzhir, avec comme seul compagnon le chat de Sergueï, tout aussi accueillant et chaleureux que son maître !
Le lendemain, réveil un peu tardif, et après avoir conclu avec Sergueï que ma contribution à cette maison de CouchSurfers serait un vernissage de la table, j’entame, pinceau en main, la pose de la première couche. En début d’après midi, la première couche posée, je pars me promener un peu sur l’île. Des arbres enrobés dans des foulars de plusieurs couleurs, des plages de sable, des messages écrit avec des pierres sur le flanc d’une coline comme au lac du Salagou et au loin la forêt, et biensûr, tout autour, de l’eau douce (et froide) !
C’est calme, c’est lent, les abords de la “ville” ne sont pas détruit par l’urbanisation et renforcent cette impression de proximité avec la nature. C’est un endroit idéal pour penser, prendre le temps de la réflexion. C’est reposant.
De retour à la maison, deuxième couche posée, je me dit que la table du coin cuisine nécessiterai aussi un vernissage, ce serait un peu plus hygiénique. Qu’à cela ne tienne, deux heures plus tard c’est une affaire pliée. Je pars me renseigner sur les horaires et disponibilités de minivan pour rentre à Irkutsk le lendemain à l’auberge d’à côté, et pars m’acheter quelques trucs à manger pour le soir. En passant à l’auberge, Chez Nikita, je me dit que c’est peut être un peu dommage de ne pas avoir essayé le “banya” russe. Tant pis, de toute façon je me suis déjà promi de revenir plus longtemps.
Une intéressante discussion avec Sergueï et un plat de pâtes plus tard je commence à regarder un film. Soudain, Tixon frappe à la porte et me propose de partir dans un banya. J’accepte instantanément et attrape ma serviette. Trois minutes de rallye dans les “rues” de Khuzhir et nous voilà arrivé derrière Chez Nikita, et nous accédons à un banya par une entrée de service. Un banya c’est presque comme un sauna, mais c’est russe, et n’allez surtout pas dire au Russes que c’est comme un sauna… La seule différence que j’ai pu constaté ? Il jettent beaucoup plus d’eau, donc la chaleur monte plus vite, et plus humide. Enfin, tout le folklore du banya c’est de se fouetter le dos et les jambes avec un bouquet d’herbes, pour faire circuler le sang je suppose. On repart de là, bouteille de vodka à la main, se promener de nuit en voiture pendant presque deux heures sur la plage, dans la forêt, au somment de la colline la plus haute du coin avec des vaches en train de pêtre.
Le lendemain, réveil tôt pour prendre le bus de 9h. J’ai le temps de prendre quelques photos de Sergueï alors qu’il sonne les cloches. Il me voit partir sans rien sur la tête, et dans sa bonté sans failles m’offre un bonnet qui se révèlera bien utile deux jours plus tard, dans le froid matinal de Oulan-Bator.
Six heures de bus qui passent finalement assez vite car je discute avec 3 espagnols qui font à peu près le même voyage jusqu’en Asie du Sud Est et avec qui j’attendrai une partie de la nuit dans le hall de la gare, mon train est à 5h du matin…
PS
Voici l'email que nous avons reçu: Salut Sergey !